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La stratégie d'entrée sur le marché chinois

E-Commerce Nation

27.03.2019


strategie entree marche chinois par paris2beijing

ÉTUDE DE MARCHÉ | PODCAST |

« Les consommateurs chinois ont des demandes qui sont ultras précises et vont se focaliser sur des catégories très spécifiques. Si on arrive avec des produits qui ne correspondent pas à leurs attentes, on aura beau dépenser tout le budget que l’on veut pour les attirer, ils ne voudront pas les acheter » – Adeline Follea et Betty Touzeau
Hello à tous,

J’espère que vous allez bien ? Je me présente, je suis Nicolas J. Chevalier, Explorateur en Chef et fondateur d’E-Commerce Nation. Je vous retrouve cette semaine pour le nouvel épisode du podcast des Explorateurs du E-Commerce en compagnie d’Adeline Follea et Betty Touzeau, co-fondatrices de Paris2Beijing. J’espère que celui-ci vous plaira tout autant que les précédents.


Nicolas Chevalier:
Hello les explorateurs et bienvenue dans la nation du e-commerce. Je me prénomme Nicolas Chevalier et suis explorateur en chef d’E-Commerce Nation. Dans ce podcast, je vous emmène dans les coulisses du e-commerce en France. Comme chaque mercredi vous découvrirez les retours d’expérience exclusifs, des histoires inspirantes et des personnalités hautes en couleur. J’espère que vous êtes confortablement installés pour ce voyage au coeur de la nation du e-commerce.
Aujourd’hui nous sommes avec Betty et Adeline pour Paris2Beijing. On va discuter un petit peu plus sur les prochaines étapes traitant de la Chine. Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?

Adeline Follea:
Avec plaisir. Paris2Beijing a été lancé il y a un peu plus d’un an et demi maintenant, en août 2017, suite à la rencontre de Betty et moi-même. On a décidé de combiner nos compétences, puisqu’on s’est rendu compte qu’on était très complémentaires. L’idée était donc d’accompagner les marques qui souhaitent toucher la clientèle chinoise, soit en Chine directement, soit ici, sur toute une logique Travel drive to store. Et nous avons aujourd’hui plusieurs dynamiques. Une dynamique qui tend vraiment vers la formation, dans une première partie avant même de pouvoir aller en Chine, de comprendre l’environnement, la culture, comment ça fonctionne, notamment le digital avec aussi un grand focus WeChat, puisqu’aujourd’hui nous sommes la seule agence “trusted partner” de Tencent. Nous formons donc sur tout ce qui est cet écosystème, comment il fonctionne, comment nous pouvons utiliser WeChat pour attirer la clientèle chinoise… Et ensuite une deuxième partie où on va être beaucoup plus dans tout ce qui est marketing digital, comme on disait pour toucher la clientèle drive to store, utiliser WeChat, faire du e-commerce etc.. Il y a vraiment une partie plus formation et ensuite application opérationnelle, avec des notions de stratégie et consulting par la suite.

Nicolas Chevalier:
Beaucoup de sujets qui sont totalement innovants par rapport au marché français. Tu as parlé de WeChat et de différentes plateformes. On sait que les habitudes du marché chinois sont vraiment différentes. Sur l’année 2018 est-ce qu’il y avait des tendances, des choses qui ont marqué cette année par rapport au marché français ? Est-ce qu’il y a une prise de conscience par rapport au marché asiatique ? Quelles sont les tendances de 2018 ?

Betty Touzeau:
Il y a une grosse tendance qui n’est pas vraiment une tendance en Chine, c’est le New Retail qui a été lancé par Alibaba il y a à peu près de deux ans. Le New Retail, c’est le principe qui est de redigitaliser les points de vente physiques pour ramener le trafic en ligne dans les boutiques physiques. Et ça se traduit par plusieurs plusieurs activités qu’on peut mettre directement dans la boutique. Notamment pour les touristes chinois, la solution va être d’installer des QR codes pour qu’ils puissent avoir des activités autour de WeChat, ainsi qu’apporter des écrans connectés, des écrans tactiles et du divertissement à travers des outils digitalisés. Et ce New Retail on en entend beaucoup parler notamment parce qu’il y a des marques autour comme Alibaba ou comme Huawei, qui vont apporter les outils nécessaires pour équiper les boutiques.

Nicolas Chevalier:
C’est plus loin que le phygital ? En France on parle de phygital, de connecter la boutique, … Ici, le New Retail c’est vraiment le fait d’intégrer Internet au sein des boutiques ?

Betty Touzeau:
Ça va même au-delà, ce qu’on entend dans New Retail et le discours qu’il y a autour de cette initiative lancée par Alibaba, c’est de revitaliser chaque physique. C’est de revenir finalement à ce qui est au cœur du retail : d’optimiser son stock, d’optimiser son inventaire et d’utiliser les datas de ses clients. Bien évidemment, aujourd’hui cela passe par les datas qu’on peut avoir, qu’on peut récupérer en ligne et c’est de se dire lorsqu’un client arrive dans mon magasin, via une application ou via son smartphone avec d’autres outils, connaître exactement le profil de ce consommateur, et de lui proposer un produit et une expérience d’achat complètement personnalisée. Donc ça va au-delà de se dire “Je vais mettre un écran tactile ou alors un miroir connecté dans les vestiaires pour amuser un peu le consommateur.” Le but est de se dire quand il rentre dans mon magasin, j’ai son profil, j’ai déjà des informations et ainsi, la force de vente va être capable de le conseiller de manière très personnalisée.

Nicolas Chevalier:
C’est pensé davantage comme une expérience digitale dès l’amont, au lieu de penser à une boutique, puis après on va essayer de connecter par rapport à cette expérience qu’il peut avoir sur le site Internet.

Betty Touzeau:
Exactement, c’est ça. On passe vraiment d’un mode de consommation de masse aujourd’hui, à un mode de consommation personnalisé. Le but est vraiment d’apporter une expérience client totale quand il arrive dans les magasins via des outils numériques qu’il utilise depuis des années.

Nicolas Chevalier:
Comment vous percevez le marché français par rapport à des innovations comme celle-ci ? Est-ce que les acteurs sont prêts ? Est-ce qu’il y a besoin de pédagogie ?

Adeline Follea:
On s’est rendu compte qu’on pensait le marché beaucoup plus mature. Effectivement, et c’est d’ailleurs pour ça que lorsqu’on a lancé Paris2Beijing, on était d’abord parti sur une logique vraiment d’accompagnement, de lancement, beaucoup plus stratégique, Consulting etc., et la plupart de nos clients n’avaient pas cette première brique de savoir et de compréhension du marché. C’est donc pour ça qu’on a ajouté la brique pédagogique, où on va essayer d’apporter cette compréhension et ce savoir parce que ça manque encore.

Nicolas Chevalier:
Beaucoup de lignes à faire bouger, que ce soit au niveau des mentalités, ou même par rapport à cette digitalisation. Il y a beaucoup de groupes qui se posent encore ces questions de transition digitale, puis il y a les comportements des utilisateurs qui évoluent. On le voit, vous avez parlé de WeChat, est-ce qu’il y a des innovations qui vont impacter très rapidement la France à ce niveau-là ?

Betty Touzeau:
Oui, WeChat aujourd’hui est l’un des plus gros impacts sur les consommations des touristes chinois qu’on peut avoir en France, et même en Europe de manière plus large. Pour avoir vécu en Chine pendant pratiquement dix ans et avoir installé WeChat en 2011, on voit que l’utilisation du smartphone et de l’application WeChat a complètement évolué, pour atteindre vraiment le touriste chinois. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, la seule possibilité pour une marque étrangère d’attirer le touriste chinois et de lui faire connaître sa marque va être WeChat. Typiquement, quand le touriste chinois vient dans Paris, il y a une technique qu’on appelle le drive to store. C’est à travers cette application qu’on lui pousse du contenu par de la publicité Overseas, donc la publicité qui va toucher directement ce touriste chinois qui voyage, et de le ramener dans les boutiques physiques.

Nicolas Chevalier:
On parle beaucoup de Facebook qui essaye de se rapprocher de ces pratiques par rapport à WeChat, d’intégrer les méthodes de paiement, d’avoir une application qui n’est pas seulement du message, mais qui est beaucoup plus complète par rapport à ça. Quelle est votre vision par rapport au marché français, cette guerre entre WeChat et Facebook ?

Betty Touzeau:
Je ne pense pas qu’il y ait une guerre. Je pense que tous les acteurs vont se regarder les uns les autres. WeChat est clairement né sur un marché qui est relativement différent de ce qu’on peut trouver en Europe et aux États-Unis, et dans le reste du monde. Donc l’application s’est développée en multi fonctionnalités. De base et d’origine, elle proposait le paiement, de la messagerie, de pouvoir faire du call, de pouvoir booker son ticket de train etc. Du coup, c’est quelque chose qui est venu au fur et à mesure des années. Il n’y a pas eu de concurrence sur le sujet parce que la data s’est directement mise sur WeChat. Et aujourd’hui c’est plus d’un milliard d’utilisateurs actifs sur WeChat, alors qu’on est à 1,4 milliard de population. Donc pratiquement tout le monde utilise WeChat aujourd’hui en Chine. Pour Facebook, la difficulté première je pense est qu’ils sont partis sur un outil de messagerie pour les amis et la famille, alors qu’à l’opposé WeChat dès le début a été pour le business et pour les individuels. Ce qui fait qu’aujourd’hui on retrouve la partie WeChat du compte officiel (business) et du compte individuel. Ce sont deux sujets assez distincts. Ce qui fait qu’aujourd’hui, par rapport aux pages Facebook où on peut retrouver les fonctionnalités qui sont très limitées, il n’y a pas vraiment de point de comparaison. Facebook devrait d’ailleurs regarder ce qui se passe du côté de la Chine parce que c’est notamment l’outil de paiement. J’ai du mal à envisager comment aujourd’hui Facebook, d’un point de vue technique, va pouvoir intégrer un outil de paiement et faire en sorte que tous les utilisateurs veulent bien s’en servir en magasin. J’ai un peu de doutes sur leur capacité à faire accepter ça aux Occidentaux.

Nicolas Chevalier:
WeChat était beaucoup plus proche des utilisateurs, peut-être a écouté et a suivi naturellement le marché, donc pas mal de tendances. Si demain une entreprise en France veut s’orienter sur le marché chinois, quelles sont vos recommandations ? Est-ce qu’il y a des schémas ? Est-ce qu’il y a des étapes ou des segments où il faut se concentrer particulièrement ?

Adeline Follea:
Déjà, je dirais que la Chine ce n’est pas pour tout le monde. Et c’est vrai qu’on entend souvent les entreprises qui disent “Non mais c’est pas grave, j’ai pas besoin de toucher beaucoup de monde ils sont un 1,4 milliard, même si j’en touche qu’un million c’est bon !” C’est beaucoup plus compliqué que ça.

Betty Touzeau:
Typiquement, aujourd’hui le consommateur chinois a des demandes qui sont ultra précises, qui vont se focaliser sur des catégories très spécifiques comme les produits bébés maternité, les produits cosmétiques, la nourriture et les produits fashion avec les accessoires de mode etc. Donc si on arrive avec des produits qui ne correspondent pas à leurs attentes, on aura beau dépenser tout le budget que l’on veut, ils ne voudront pas en acheter. Il y a aussi cette demande pour acheter des produits importés de marques de luxe, de produits premium, donc c’est d’abord vérifier et certifier que son produit a bien une appétence du côté des consommateurs chinois.

Clément Goubon:
C’est ce que j’allais poser comme question, quel type de produits plaît aux consommateurs chinois ? Est-ce que c’est vraiment des produits typiquement français qui plaisent aux consommateurs chinois, ou bien ça peut être différentes marques ? Est-ce que c’est vraiment le “Made in France” ?

Betty Touzeau:
Le “Made in France” c’est un plus, c’est-à-dire que si on arrive avec une marque avec un logo Made in France, et si on est sur la food et sur le bio, ce sont actuellement des tendances et des facteurs qui vont faire que le consommateur va plus aller vers votre marque ou non. Après, il y a aussi le savoir-faire à la française. On est assez réputé pour avoir des produits, que ce soit en cosmétique en termes de laboratoire, ou des produits un peu plus artisanaux dans les provinces, ce sont des choses qui sont réputées. Mais là où ils veulent vraiment avoir le même mode de vie que nous, c’est au niveau des produits qu’un français lambda utilise au quotidien ? Que ça soit la nourriture, le cosmétique ou les produits qu’on va donner pour nos bébés. Et c’est pour ça qu’il y a des marques qui sont axées moyenne gamme, comme Yves Rocher par exemple, une marque française très connue, qui a commencé à avoir du succès en Chine et qui peut-être il y a quelques années, n’allait pas en avoir parce que ce n’était pas considéré comme une marque de luxe ou plutôt haut de gamme. Aujourd’hui, elle a sa place parce que les consommateurs chinois recherchent les marques avec un rapport qualité-prix assez intéressant pour eux.

Nicolas Chevalier:
Il y a tout un développement aussi du comportement de l’utilisateur. Il y avait quelque chose qui m’avait choqué, c’était par rapport aux fiches produits, qui sont totalement différentes de ce qu’on peut voir en France. On voit des fiches produits beaucoup plus documentées, avec l’histoire du produit, des photos, et même des vidéos. Du coup, c’est une expérience utilisateur totalement différente. Est-ce que vous accompagnez les entreprises sur ces caractéristiques ? Leur dire qu’ils ne sont pas là seulement pour vendre ou pour présenter un produit à un prix, mais aussi pour raconter quelque chose autour de ce produit.

Adeline Follea:
C’est effectivement la première étape. Ça nous est déjà arrivé de déconseiller certaines marques d’aller en Chine, parce qu’il faut une histoire et comme dit Betty, il ne faut pas juste un bon produit. Derrière, il faut une bonne histoire de marque, il faut avoir quelque chose à raconter et il faut bien le raconter. Il y a aussi des exemples de très belles marques qui sont allées en Chine et qui malheureusement n’ont pas su présenter leurs produits correctement par rapport à la clientèle chinoise et ce qu’elle attend. Les pages produits sont 20 fois plus longues, il faut raconter l’histoire, comment il est fabriqué, il faut avoir des photos de l’usine, des photos de la marque, des gens et aussi des labels. Toutes ces choses-là, sont des choses que les Chinois ont besoin. Les Français en ont moins besoin, même si l’on y vient de plus en plus, mais on a moins besoin d’avoir des pages très longues pour faire confiance à un produit, tandis que c’est vraiment fondamental en Chine.

Nicolas Chevalier:
Ce qui fait partie de l’expérience, ce n’est pas seulement l’achat du produit, ni d’avoir un site traduit en chinois, mais c’est d’avoir une interface qui apporte une valeur et une expérience, même si elle est digitale, de pouvoir la retranscrire avec un univers. On a vu un peu ces facettes, comment appréhender ce marché chinois. Est-ce que pour vous il y a des tendances sur cette année 2019 qui vont se détacher et qui vont faire que ce marché va continuer d’évoluer autant sur l’aspect technologique, que sur l’aspect des utilisations et des utilisateurs ?

Betty Touzeau:
En 2019 je pense que ce qui va encore plus s’amplifier, et qui va devenir quotidien, c’est toute cette vague de touristes chinois qui arrive et qui commence à vouloir communiquer de la même façon qu’ils communiquent avec les marques étrangères qui sont en Chine. Donc cela va consister à rencontrer les marques et pouvoir avoir une expérience client qui est beaucoup plus élaborée, comme ils peuvent retrouver en Chine. Je pense que là où les marques et les retailers devraient se focaliser en 2019, c’est comment capitaliser sur l’image de marque qu’ils ont déjà créée en Chine ou non, si ce n’est pas le cas qu’ils commencent à travailler sur leur compte officiel WeChat, et s’ils ont une notoriété c’est de capitaliser sur cette communauté qu’ils ont déjà créée, de la rendre active et de leur proposer des activités de promotion. Il faut vraiment les engager avec l’histoire de la marque sur place.

Adeline Follea:
Parce que c’est vrai qu’au niveau des marques, énormément de personnes ne se rendent pas compte que le touriste chinois n’est plus juste un car rempli qui s’arrête aux galeries et qui repart. Il y a de plus en plus de couples qui voyagent en individuel, comme nous on aurait tendance à voyager, et qui eux représentent la nouvelle classe chinoise, la classe moyenne qui est premium avec un vrai budget. En moyenne aujourd’hui les Chinois en France dépensent 1.000 euros en shopping à chaque voyage, ils sont plus de 2,2 millions à être venus l’année dernière, donc il y a vraiment une clientèle qui est de plus en plus premium, plus en plus intéressante et qui est loin de ce qu’on a l’habitude de voir. Aujourd’hui il y a un vrai potentiel, on ne peut pas passer à côté.

Nicolas Chevalier:
La classe moyenne qui continue de se développer, j’avais lu des articles sur ce sujet, durant ces dernières années, elle s’est vraiment constituée et elle a continué à se développer et donc avoir plus des passions, une continuité de l’expérience avec les marques.

Adeline Follea:
C’est ça, et ce sont des personnes qui ont de plus en plus d’argent et voyagent de plus en plus. Aujourd’hui, la France est la première destination pour les touristes chinois. Donc il faut qu’on en profite, cela fait partie de tout ce que disait Betty. Il faut prendre en compte leurs moyens de paiement, leur habitude de consommation. Si on ne leur répond pas, ils iront dans un pays qui répond à cette demande. Par exemple en Italie, les marques sont très fortes et ont très bien compris comment fonctionnent les Chinois et ce qu’ils attendent. Donc si on n’est pas assez bon, les Chinois iront visiter ailleurs, même si on a la plus belle ville au monde.

Nicolas Chevalier:
Un lien qui est peut-être privilégié avec cet aspect culturel, avec le made in France, ce sont des facteurs qui sont très positifs. Si demain une marque vient vous voir, quels sont les axes que vous allez aborder ? C’est l’aspect de marque, l’aspect de l’histoire derrière, est-ce qu’il y a d’autres éléments que vous allez creuser avec ces partenaires ?

Betty Touzeau:
Bien sûr, il y a l’élément culturel qu’on va creuser, mais ce qui est important c’est de comprendre les consommateurs chinois. C’est un peu la base quand on veut vendre un produit, notamment quand on veut le vendre à un pays qui a plus de trois mille ans d’histoire.

Nicolas Chevalier:
Vous regardez la concurrence, peut-être sur les places de marché à l’international ?

Betty Touzeau:
En fait, il va y avoir deux axes à prendre en considération. Si on a affaire à une marque qui veut développer sa notoriété en Chine continentale, on va devoir passer par une étude de marché. Donc on va regarder le positionnement des concurrents, s’il y a déjà une appétence pour le produit, comment on va pouvoir positionner la marque avec le prix, comment on va travailler sa publicité, … Et puis en fonction de ces critères on va déterminer sur quels canaux de vente ils vont pouvoir vendre. Que ce soit sur une marketplace généraliste comme Tmall ou JD.com, ou bien s’ils sont sur une verticale, on va leur proposer une marketplace qui correspond davantage à leurs produits. Par exemple, s’ils proposent du cosmétique ou des produits bébé, on va plus aller vers des marketplaces comme Kaola. S’ils sont plus sur un esprit de déstockage et sur des marques premium ou luxe, on va aller sur VIPshop. Après, on peut même descendre dans les verticales très locales avec des applications mobiles comme Pinduoduo, qui n’est pas connue en France mais qui a pratiquement dépassé Taobao en Chine aujourd’hui, et aura beaucoup de volumes pour les marques bas de gamme, contrairement au positionnement premium que peut avoir Tmall par exemple, la marketplace BtoC d’Alibaba.
La première chose qu’on va faire, c’est définir un canal de vente qui va correspondre à leurs produits. Ensuite, on va choisir des canaux de communication pour communiquer sur leur marque et pour faire des campagnes d’influence avec des KOL par exemple, les influenceurs, leur créer des short vidéos, les aider à faire du live streaming. On va imaginer pour eux toute une stratégie en déterminant quels sont les canaux sur lesquels ils vont devoir aller et avec quel type de budget, comment il va falloir s’y prendre, comment traduire leurs produits, quels sont les délais d’inscription etc..

Nicolas Chevalier:
Il y a un écosystème qui est totalement différent de la même manière qu’en France, si on parle de places de marché il n’y a pas que Amazon, Cdiscount, il y en a des spécifiques. Il y a donc cette cartographie. Et puis par rapport à ces communautés digitales, les KOL ce n’est pas forcément structuré comme sur notre marché. Parfois ce sont des groupes hermétiques c’est ça, est-ce que vous pouvez nous dire un mot dessus ?

Betty Touzeau:
Oui, c’est vrai que les KOL sont comparables aux YouTubeurs de jeux vidéo ou de cosmétiques qu’on va trouver ici. En Chines, il y a plusieurs groupes. Dans les premium, on retrouve toutes les stars, les chanteurs, les danseurs, les acteurs ou les présentateurs télé qui vont eux être le top de l’influence quand il va s’agir de parler d’une marque ou d’un produit. Ensuite, on va avoir des groupes qui ressemblent aux youtubeurs qu’on peut retrouver en France, qui vont être spécialisés sur une catégorie de produits en particulier et qui vont avoir la particularité de directement ouvrir leurs comptes vendeurs sur une marketplace. C’est ça qui fait la différence avec les KOL que nous pouvons avoir en France et qui vont être vendeurs. Non seulement ils vont représenter une ou plusieurs marques et plusieurs produits, mais en plus ils vont ouvrir leur boutique et proposer directement les produits à la vente.

Nicolas Chevalier:
Ils ont un système de commissions ?

Betty Touzeau:
Ils ont des systèmes de commissionnement. La partie qui reste encore floue, c’est que les vidéos de live streaming, c’est-à-dire une influenceuse qui va faire une vidéo sur une marque de cosmétiques, directement lorsqu’elle fait sa vidéo live, il va y avoir un petit bouton où on peut cliquer, arriver sur Taobao et directement acheter le produit. C’est un peu le next level des influenceurs. Après, on a deux types d’influenceurs qui vont être des personnes assez lambda comme nous, et qui vont pouvoir se constituer un petit groupe de fans et parler de sujets divers et variés et présenter aussi des produits.

Nicolas Chevalier:
Donc ça ce sont des logiques totalement différentes qu’il faut peut-être intégrer parce que les taux de conversion doivent être totalement différents. On trouve des influenceurs qui peuvent être vendeurs, contrairement à ce qu’on a en France. C’est une logique de marché qui est totalement différente. Aujourd’hui, vous avez parlé de formation. Quels sont les différents leviers que vous avez en place pour accompagner les entreprises, ou bien des thématiques que vous allez accentuer sur cette profondeur ?

Adeline Follea:
On a différentes thématiques effectivement, car toutes les marques et toutes les entreprises ne sont pas au même niveau. On a des formations pour ceux qui veulent partir de zéro avec toute la compréhension de la culture, pourquoi en 2019 le client chinois en est où il est, qu’est-ce qui dans son passé de pays, d’influence fait qu’aujourd’hui il consomme et agit de cette manière. Ce qui nous aide énormément, ce sont les dix ans de métier en Chine et son expérience de vie à la chinoise. Car on partage du vécu, comme toutes les formations, mais là c’est encore plus intéressant d’avoir ce retour interne. Après, on a les formations concernant l’écosystème digital, on va voir tous les acteurs, les opérateurs, comment fonctionne la logistique, est-ce qu’on fait du crossborder e-commerce, du e-commerce domestique, etc. On aborde vraiment tout ce dont on va avoir besoin afin de comprendre le digital et le e-commerce, les douanes, tout. Ensuite, on a des formations beaucoup plus marketing, que ce soi avec WeChat, du niveau 1 comment j’ouvre mon compte de marque, comment je communique sur mon compte de marque, est-ce que je fais de la pub, est-ce que je crée un e-commerce, est-ce que je fais un Store, un unique programme etc.. Globalement, le niveau poussé expert WeChat. Après, tout ce qui est formation KOL. Comment j’interagis, quels produits je vends, à quel moment, à qui, sur différentes thématiques. Mais de façon générale, ça reste sur tout ce qui est le consommateur le digital et le marketing.

Nicolas Chevalier:
Accompagner au fur à mesure. On voit déjà que sur la France, on a cette problématique des gens qui veulent faire cette transition digitale en disant il me faut un site e-commerce alors que l’on peut intégrer des clauses de marché spécialisées, on peut tester avoir vraiment un développement progressif. J’imagine que c’est aussi une logique que vous préconisez peut-être, de faire des itérations pour développer, voir un peu l’attraction sur les différents marchés.

Adeline Follea:
Oui tout à fait. C’est vrai qu’on ne va pas forcément recommander le même projet et la même réflexion à toutes les marques, parce que certaines marques n’iront jamais vendre sur Tmall. Et puis certaines marques vont avoir besoin d’être en domestique quand d’autres pourront se contenter de crossborder. La logique est vraiment spécifique et indépendante à chaque marque et chaque marque recommence à zéro. Ce qui est aussi un des gros intérêts de notre travail, c’est qu’on ne s’ennuie pas, parce que chaque projet est différent.

Nicolas Chevalier:
Et par rapport au marché français, est-ce que vous pensez que les e-commerçants en France sont ouverts à l’international, pas spécifiquement à la Chine ? On sait que ça peut évoluer sur l’année 2018. Mais il y a encore beaucoup de choses à faire. Pourquoi? Parce que c’est plus une logique de se dire j’ai mon business sur la France, peut-être sur des pays limitrophes. Comment vous voyez la chose sur le marché sur cette tendance à l’international ?

Adeline Follea:
Pour être honnête, j’ai un peu l’habitude parce que j’ai fait plus de 12 ans à l’international. J’ai toujours accompagné des marques françaises qui voulaient faire du e-commerce à l’étranger, donc à l’origine j’étais très concentrée sur l’Europe, d’abord en travel puis commerce généraliste, et j’accompagnais donc les entreprises qui voulaient aller en Espagne, en Italie, en Angleterre etc. On avait beaucoup de problématiques et je me souviens quand on a commencé en 2007, j’avais des gens au téléphone qui nous disait “Mais qu’est-ce qu’un comparateur de prix ?” À l’époque, c’était vraiment le niveau zéro et on pourrait croire que 12 ans après, les gens sont prêts. Mais on a encore beaucoup de personnes, et on le voit avec la Chine au quotidien, qui nous disent “non mais e-commerce n’est pas la priorité, on verra”.

Betty Touzeau:
Sur le sujet de l’international, tous les clients qui viennent vers nous veulent se développer à l’international. Donc bien évidemment, il y a une demande qui est là, elle est forte et croissante, que ce soit pour les marques un peu plus haut de gamme luxe ou même les marques naissantes, des PME, des TPE qui n’ont pas forcément de budget. Tout le monde peut aller sur l’international. Là où il y a une lacune, en ayant un oeil critique sur la France, mais sur cette optique ECN a un rôle très important et qui a du sens, c’est de fournir plein d’informations et de les aider dans leurs démarches de développement. Parce qu’effectivement, il y a un accompagnement aujourd’hui qui n’est pas forcément très présent, mais c’est ce qu’on essaie de faire sur la Chine. Mais il faut prendre les choses de zéro et se dire que les cultures sont différentes. Donc quand on va en Italie, en Espagne ou quand on va en Chine, il y a une éducation sur la culture à apprendre. Après, bien évidemment, il faut réapprendre à vendre ses produits avec une histoire qui va parler et une approche différente. Et ça c’est grâce à des médias et des agences comme nous. Je pense qu’il en faut plus.

Clément Goubon:
J’avais j’avais une question, lorsqu’on entend marque, on entend souvent grand groupe, est-ce que l’on peut s’internationaliser, ou en tout cas aller sur la Chine, même si on n’est pas une très grosse marque ? Est-ce que ça peut être la petite structure qui a une notoriété locale et qui a déjà son site e-commerce qui marche très bien, qui produit des produits français et qui souhaite aller sur un marché où se il dit il y a un potentiel. Est-ce qu’il peut y aller ?

Betty Touzeau:
C’est une très bonne question, et c’est une question qui est assez récurrente et qu’on nous pose régulièrement. Dans la majorité des cas, bien évidemment ça va être des marques de luxe et Premium qui vont avoir du budget pour aller en Chine. Néanmoins, aujourd’hui il y a des exemples de marques et notamment de producteurs de vins, qui n’ont pas forcément les moyens de base pour aller en Chine, mais qui parce qu’ils ont découvert qu’il y avait un distributeur qui était intéressé par leur marque, ont commencé petit à petit sur les marchés offline en BtoB, et puis ça s’est ouvert et leur marque a pu prendre un peu plus d’ampleur. Mais effectivement, je pense que pour aller en Chine continentale en tout cas, il y a quand même une première étape qui correspond aux moyens financiers et humains, car il faut aussi avoir les ressources humaines pour y aller. En revanche, là où il y a une porte d’entrée sur le marché chinois et sur les consommateurs chinois, ce sont les touristes chinois qui viennent directement à la marque. Il y a ici une réelle opportunité à saisir, et c’est un vrai levier de croissance. Pour les gens qui veulent aller en Chine, il faut d’abord commencer à travailler votre compte officiel WeChat en faisant un travail sur votre marque, en faisant en sorte que vous commenciez à être connu.

Clément Goubon:
Il faut être répertorié quelque part pour les consommateurs chinois.

Betty Touzeau:
Exactement. Donc quand ils voyagent ils vont vous voir, ils vont pouvoir aller dans votre boutique et vont devenir vos “influenceurs”. En effet, ils vont être les futurs influenceurs de cette marque, et quand ils seront en Chine continentale, ça sera beaucoup plus simple pour vous, une fois que vous avez cette notoriété, pour aller ouvrir un compte vendeur sur une marketplace voire un shop physique plus tard.

Nicolas Chevalier:
C’est intéressant parce que c’est exactement le même schéma qu’un petit commerce qui veut s’orienter vers le e-commerce. C’est-à-dire pas forcément avoir un site e-commerce dès le départ ou être sur une place de marché, mais déjà d’être localisé sur Google Maps, sur Facebook ou autres pour que les utilisateurs trouvent, et ensuite créer un lien. Peut-être que les gens vont vous contacter pour commander sans même forcément posséder une boutique. Là, c’est exactement le même process, sans vouloir aller jusqu’en Chine, mais être présent et avoir peut-être de l’attraction. J’ai le souvenir par exemple des domaines de vin qui reçoivent des touristes chinois, qui commencent à vendre et se disent pourquoi pas faire des efforts, et après de prendre éventuellement un stagiaire, des ressources et donc de travailler, mais plus de sentir cette traction avant de se développer vers un business. Je pense que c’est l’essentiel sur le développement.
On vous invite à découvrir plus d’infos sur votre site Paris2Beijing, de passer de Paris à Beijing. N’hésitez pas, il y beaucoup de contenu, d’informations, des formations aussi à venir et puis du futur contenu à faire ensemble peut-être sur les prochains mois. Je vous remercie encore pour votre temps et pour cet entretien.

Adeline Follea et Betty Touzeau :
Merci à vous !

Nicolas Chevalier:
J’espère que ce podcast vous a plu, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour la découverte d’une nouvelle personnalité. N’hésitez pas à vous abonner aux podcasts des explorateurs du e-commerce sur votre plateforme préférée et à partager sur les réseaux si vous avez apprécié cet épisode. À très vite pour de nouvelles aventures et n’oubliez pas que l’exploration se poursuit sur E-Commerce Nation.

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